Culture & Covid « On ne s’habitue pas à vivre sans musique ! »

Culture & Covid « On ne s’habitue pas à vivre sans musique ! »

Publié le 07-04-2021

Rencontre #Interview #Orchestre de Chambre de Toulouse #Gilles Colliard #Covid #musique classique

Violoniste, compositeur et chef d'orchestre, mais aussi enseignant, Gilles Colliard est  Directeur Musical de l’Orchestre Baroque de Barcelone et Directeur Artistique de  l’Orchestre de Chambre de Toulouse. Il nous livre ses réflexions sur l’impact du  confinement et de la crise sanitaire dans l’univers de la musique classique.  

Passionné de musique avec un grand M, Gilles Colliard s’est toujours opposé aux étiquettes. Car cet homme aux multiples facettes se nourrit d’une diversité qui dérange dans un monde où  chaque chose est supposée être à sa place. Ainsi depuis des années, le chef d’orchestre qui se  décrit comme un musicien hyperactif voyage à travers la planète pour partager sa musique.  Pourtant, cette activité très dense a soudainement été mise à l’arrêt au printemps dernier et,  malgré l’envie de se projeter dans un avenir plus souriant, ces balades de confinement en  confinement, raisonnent bien tristement aux oreilles du musicien. 

   Alors comment les orchestres vivent-ils cette période de trou noir culturel ? « Les orchestres sont  aidés financièrement par l’Etat et bénéficient du chômage partiel. Cependant les artistes vivent  difficilement le manque de concert et de partage qui sont le cœur de notre métier, répond Gilles  Colliard. Les concerts nécessitent une préparation importante. Aussi, c'est une grande frustration  pour les musiciens de ne pas monter sur scène et de voir au final leur travail partir en fumée avec  l’annulation ou le report de concerts par centaines ».  

   Dans ce contexte, le plus déprimant est certainement de constater que la musique est aux  abonnés absents des discours politiques et médiatiques. On parle de culture, oui, un peu, mais  on ne parle pas de musique. Pourtant l’histoire a prouvé à maintes reprises qu’en temps de crise  ou de guerre, la musique rassemble, adoucit et rend plus supportables des climats dramatiques. « Le succès des quelques concerts maintenus durant l’été illustre bien ce manque cruel dont  souffre le public. Notre société est déjà trop individualiste et le repli sur soi imposé par la crise  sanitaire ne fait que noircir les traits de ce portrait. Je crains de ne jamais retrouver le monde du spectacle que l’on a perdu », déclare Gilles Colliard.  

   Avec amertume, les représentants du secteur déclarent se sentir abandonnés alors qu’ils estiment  que l’art est vecteur de l’humanité et de la solidarité nécessaire à la guérison de notre société. Relégués dans une catégorie d’activité « non essentielle » et plongés dans une incertitude  quotidienne anxiogène, ils plaident en faveur de leur discipline et tirent aujourd’hui la sonnette  d’alarme « pour que l’on ne s’habitue pas à vivre sans musique ». 

Une pause de réflexion créative 

   Pour autant, et fort heureusement, la crise sanitaire est pour beaucoup d’entre eux l’occasion de  prendre le temps de composer, d’initier de nouveaux projets, de mettre à profit les technologies  numériques pour garder le contact avec leur public, tout comme les enseignants qui s’initient aux  cours en visio… En l’occurrence, Gilles Colliard a été l’initiateur de vidéos pédagogiques et a  lancé sur sa page Facebook une série de courts films éducatifs autour d'œuvres musicales. «  L’objectif est de partager mon savoir avec le plus grand nombre en utilisant des supports et des  formats accessibles. Je rêve désormais d’inventer une nouvelle manière de parler au public, plus  humaine, qui casserait le fossé entre les spectateurs et les interprètes », conclut le musicien.

Sarah Gerothwohl

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